Nous avons quitté Utoro pour retourner plus au sud, mais proche de la côte est, pour une étape dans une auberge qui longe une rivière et qui permet, en théorie, d’observer à la nuit tombée des ketoupa de blackiston.
Nous avons pris notre temps, afin de pouvoir observer les abords de la route, dans l’espoir d’apercevoir un renard.
Une petite incursion sur une petite route pour aller voir une cascade… c’est en fait à 12km, ce que n’indique pas le panneau à l’embranchement de la route principale : nous faisons demi-tour.
Nous repassons par une route que nous avions empruntée il y a deux ans, où il y avait une marre dont l’eau est transparente et le fond bleu cobalt : avec toute la neige, le chemin est recouvert et donc impraticable.
Il y avait également une petite route qui menait à un promontoire d’où voir un très beau lac de montagne : là aussi la route est impraticable, recouverte de neige.
Tant pis, nous faisons une pause déjeuner : il y a tellement de soleil que l’on peut rester dehors en tee shirt (mais je garde le tour de cou tout de même).
On repart, sur la route lala lalalala, et on s’arrête un peu plus loin sur le côté pour une photo : un champ immaculé avec un arbre solitaire planté dedans et au loin une rangée d’arbre.
Au moment de rentrer dans la voiture, j’aperçois une tâche sombre sur la neige au loin, dans le champ : c’est un renard, qui est soit mort, soit en train de ronquer comme un bienheureux.
Pom, pom, pom, on change le matériel pour sortir l’artillerie lourde : le renard est loin, même au 800mm, et il n’est pas possible de s’approcher (il faudrait les raquettes pour de toutes façons s’enfoncer dans 1 mètre de poudreuse et faire un bruit pas possible) mais bon on verra bien ce que ça donne, surtout que le vent fait trembler le télé, ce qui me décide du coup à passer derrière la voiture pour m’abriter.
Là, Mymy me signale qu’un autre renard se trouve devant la voiture : je regarde et effectivement, il s’apprêtait à traverser, mais redoute de passer devant le véhicule.
Je m’installe d’abord discrètement, toujours derrière la voiture, dans l’espoir qu’il traverse quand même, mais finalement je dois à nouveau changer de position car il décide de rebrousser chemin.
La mitraille commence 🙂
Et le rusé renard ne rebrousse en fait pas chemin, mais il va nous contourner pour traverser suffisamment loin derrière la voiture : tant mieux, on ne peut que mieux le prendre en photo, Mymy et moi.
Arrivé au milieu de la route, il nous tourne le dos et s’éloigne, sur le bitume : on devine qu’il rejoindra le champ un peu plus loin, profitant du talus pour se cacher de nous.
On attend un peu histoire de voir s’il s’avance dans le champ en direction du dormeur du val, mais non.
Nous repartons, content d’avoir enfin le renard au tableau de chasse.
Nous arrivons à l’auberge peu de temps après : c’est superbe, hyper chaleureux, avec un hall façon salon, où on descend deux marches pour gagner un espace avec 3 canapés 4 places entourant une table basse / cheminée à la japonaise (au centre de la table basse un foyer de sable avec des braises) et deux grandes baies vitrées donnant sur la rivière et ses berges arborées.
Une foultitude d’oiseaux viennent profiter des mangeoires et des arbres, et il y a même un couple de martres du Japon !
La chambre est super chouette et il y a même un balcon qui donne sur la rivière.
Les bagages dans la chambre et après une tasse de thé, nous retournons dans le hall pour faire des photos.
Ensuite nous passons un moment avachis dans un canapé, en profitant de la douce chaleur des braises et de la vue.
Nous voyons le chef cuisinier aller pêcher à l’épuisette dans la réserve de la rivière le poisson du repas du soir : là c’est sûr il sera frais.
Une particularité de l’endroit est également de recevoir régulièrement la visite d’un couple de ketoupa de blackiston lorsque la nuit est tombée : nous restons un moment à l’affût avant le dîner, mais rien… tant pis.
Vient le moment du dîner, dans une salle aménagée façon auberge d’autrefois.
Le repas est copieux, délicieux, un succulent saké de plus à notre compte.
On nous amène nos poissons, préparés en sashimi, servis disposés sur l’animal entier, tête et queue relevées et piquées sur un suport, ce que nous prenons pour un symbole de fraicheur.
Je commence à plaisanter en disant qu’on pourrait faire une marionnette en mettant le doigt dans la tête du poisson et là, de concert, nos deux poissons se mettent à bouger tête, queue, et ouïes… si nous avions eu le hoquet, il en eut passé sur le champ.
J’avais déjà lu à propos du service du poisson dont le filet est découpé sur l’animal non tué et servi « sur la bête » encore vivante, symbole pour eux du paroxysme de la fraicheur, mais je ne m’attendais pas à m’en voir servir un jour… la « surprise » passée, cela reste malgré tout juste impressionnant de voir ce poisson toujours vivant.
Bon j’ai sans doute heurté les âmes sensibles, et choqué les défenseurs des bêtes « même celles qui ont 12 secondes de mémoire » (bonjour madame ! [12s] bonjour madame !), mais n’oublions tout de même pas, dans la rivière d’où on l’a sorti pour nous en faire manger les filets encore vivant, comment il finit ce poisson : le ketoupa, la marte, le renard, ou autre organisme piscivore qui lui est supérieur dans la chaîne alimentaire, le cuisent-ils avant de le dévorer ?
Après ce copieux et aventureux dîner, retour à la chambre et… dodo.