Jour 11 : vague de froid à Shinagawa

Jour 11 : vague de froid à Shinagawa !

Ce pourrait être le titre d’un OSS 117 ou d’un SAS, mais ce ne sont que les climat et lieu de la journée : passer de 35°C à 25°C et du vent, c’est la douche écossaise ! 🙂
Celle-ci commence par un petit tremblement de terre à 5h10, de magnitude 4.2, qui ne fait que faire osciller la maison à basse fréquence : rien ne bouge, personne ne se réveille.
Pour information, il existe des applications pour smartphone qui reçoivent les alertes de la Météo japonaise concernant les séismes et donnent l’alarme si un séisme de la magnitude que l’on a paramétrée va arriver à l’endroit où l’on se trouve. J’utilise depuis longtemps Yurekuru Call, qui a le mérite de fonctionner. Elle reprend le symbole du poisson chat, vieille légende expliquant les tremblements de terre par le fait qu’un poisson chat géant situé sous le Japon remue de temps en temps, plus ou moins fort. Cette légende est illustrée dans le tout premier J-Drama que nous avons vu, Shikaotoko aoniyoshi (le fantastique homme cerf), qui date de 2008 et dont l’action se situe principalement dans la ville très touristique de Nara, où vivent en liberté de nombreux cerfs Sika.
Tremblement de terre ou non, la journée commence tôt, puisque nous avons rendez-vous à 11h30 avec des collègues de Mymy à Shinagawa pour déjeuner.

Notons que la gare de Shinagawa n’est pas dans l’arrondissement de Shinagawa, mais juste au nord de celui-ci. C’est un nœud ferroviaire important, avec notamment des lignes de shinkansen et la ligne de « RER » circulaire Yamanote.
J’en profite pour parler un peu des trains au Japon : il est vrai qu’ils sont propres, climatisés, connectés, avec un système d’information à quai et en rame qui laisse rêveur, d’une ponctualité dont la réputation n’est pas usurpée. Il est vrai également que les compagnies de train au Japon sont privées.
Petit message donc à tous ceux qui sautent sur une conclusion rapide : l’État subventionne et les billets sont plus chers 😉
Accessoirement, le train, bien que privé, reste un service public, pas un distributeur de dividendes : des lignes campagnardes, bien que quasiment plus fréquentées du fait dans certains endroits de la désertification démographique, sont restées ouvertes jusqu’à ce que, par exemple, le dernier lycéen – empruntant la ligne matin et soir pour joindre sa petite ville isolée et son lycée – ait terminé le lycée.

Nous partons bien à l’heure, mais nous trompons de train : ce n’est pas le « rapid » que nous prenons, mais le « local »… En clair : nous avons pris l’omnibus au lieu du semi-direct. Évidemment, nous ne nous en apercevons que lorsqu’il est l’heure du rendez-vous et que nous ne sommes toujours pas à Tokyo 🙂
Heureusement nous sommes connectés, donc nous pouvons prévenir et rechercher un itinéraire plus optimisé : nous nous arrêtons à une gare pour changer du « local » au « rapid » et limiter le retard à 30 minutes… Cela donnera lieu à une discussion intéressante avec nos hôtes, ceux-ci mettant notre erreur sur la complexité du système local/rapid : nous ferons amende honorable en expliquant que nous aurions dû être plus attentifs, notamment parce que nous connaissons ce système, qui reste tout de même bien indiqué sur les panneaux de quai (indication par texte et couleur), mais aussi parce qu’au Japon, contrairement à chez nous, chaque quai est dédié à une mission de train, quitte à construire de nombreux quais et malgré le manque d’espace.
C’est un principe organisationnel global au Japon : tâcher de faire en sorte de ne pas avoir à gérer l’exception, l’imprévu.

Nous déjeunons dans un excellent restaurant spécialisé dans le poulet : si Babichou opte à nouveau pour des karaage, Mymy et moi nous régalons d’un succulent oyakodon (親子丼). Les collègues de Mymy sont vraiment super sympa, nous discutons de tout et de rien et le temps passent très vite.
Ils trouvent que le Français est une langue difficile… bah bien sûr : et les kanji du Japonais ? 🙂
Plus de 2000 d’usage courant, dont 1000 seulement sont appris à l’école primaire, avec plusieurs lectures (prononciation) possibles, au point qu’il existe la blague d’un non Japonais demandant à un Japonais :
– ah tiens, j’ai un collègue qui s’appelle « machin » (utiliser n’importe quel mot japonais) : ça veut dire quoi ?
– je ne sais pas : comment tu l’écris ?
Bref, parfois je me dis que la liste de leurs inventions et découvertes n’est en fait due qu’à une échappatoire récréative à l’apprentissage ou la mémorisation des kanji : « oh la barbe ces kanji… tiens pour me reposer, je vais inventer la montre à quartz ! »

Après déjeuner, Mymy passe l’après-midi avec ses collègues pour discuter, entre autres, boulot.
Babichou et moi nous rendons au Maxell Aqua Park, situé à côté de la gare de Shinagawa, dans un immeuble : c’est pourtant immense, sur deux étages, avec une « piste à dauphins » et un tunnel aquatique dans lequel passent au-dessus de nous des espèces aussi grosse que la raie manta.
Bien que nous soyons en semaine, l’endroit est bondé… Mais il est vrai que les enfants sont en vacances et, bien souvent, les femmes ne travaillent pas. Il y a tout de même pas mal de pères et pas mal de grand-parents accompagnant leurs petits-enfants.
Il y a également un spectacle de dauphins, pendant lequel nous nous ferons copieusement arroser, n’ayant pas voulu payer un supplément pour un poncho plastique 🙂
D’aucun criera au scandale d’assister à un spectacle de dauphins captifs d’un aquarium d’immeuble… je suis plutôt d’accord sur le fait que les dauphins seraient, en théorie, mieux en liberté. On ne peut toutefois s’empêcher de penser qu’au rythme où vont les choses, ils seront bientôt mieux en captivité que dans cette poubelle qu’est en train de devenir l’océan.
Je profite également de l’occasion pour parler de the Cove : n’oublions pas qu’un documentaire est biaisé, parce qu’il y a au départ une intention du documentariste de montrer quelque chose. Or, comme l’a dit le grand philosophe Obi Wan Kenobi : « les vérités auxquelles nous tenons dépendent avant tout de notre propre point de vue ». Il convient donc toujours d’explorer la deuxième face de chaque histoire et de visionner également le documentaire Behind the Cove, visible notamment sur Netflix.

Remarque qui n’a rien à voir : il y a certes ici des araignées, des moustiques, des fourmis, des chauve-souris, etc. etc. mais… pas de mouche ! Quel pied.

Prochain épisode, jour 12 : quand typhon tourne sol.


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